Le Bonnet & la Pique

De La Mouche VII
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Le Jeu

Le Bonnet & la Pique a été initialement prévu pour des parties se déroulant dans le contexte de la révolution française (1789-1799). Cependant, il peut, et même devrait, être aisément utilisé pour tout autre contexte de révolution, rébellion, guerre civile, voire même simple agitation politique, tout particulièrement à l’époque dite « moderne » (exemples : guerre civile anglaise, soulèvements jacobites, guerres carlistes, Fronde, guerres de religion, guerre de quatre-vingts ans...). Mais on peut aussi utiliser des contextes similaires à d’autres époques, antérieures ou postérieures.

L’important dans Le Bonnet & la Pique n’est pas tant l’époque que la mentalité ambiante, et plus particulièrement celle des joueurs. Le Bonnet & la Pique utilise un système où le caractère des personnages, et leur implication dans les luttes de partis et d’idéaux, sont essentiels. En fait, c’est un jeu qui permet de jouer des partisans, au sens large, des « gens de parti », dans à peu près n’importe quel contexte, même en temps de paix si le MJ est intéressé par un contexte d’intrigues et de combats limités type Les Trois Mousquetaires ; il ne permet par contre pas de jouer des gens qui ne sont pas impliqués dans les grands combats de leur époque ou même qui s’y trouveraient impliqués par hasard, et essaient seulement de survivre, quand bien même l’époque en question serait la révolution française.

Le Bonnet & la Pique n’est pas un jeu réaliste, et n’est pas non plus à proprement parler un jeu historique. Il est fondé, finalement, sur des concepts généralement rejetés aujourd'hui par l’histoire académique (encore que...) : que la foi peut déplacer les montagnes, l’éloquence, soulever les foules, les idéaux, changer le monde par leur seule force, en bref, que quelques individus – des inspirés, des chefs-nés, des héros, des hommes providentiels – peuvent changer l’histoire. Pour reprendre la révolution française, c’est donc un jeu qui n’aura que faire des questions d'éventuelle lutte de classes entre une bourgeoisie capitaliste émergente et une noblesse féodale conservatrice, ou de la vie des petites ou moyennes gens pris entre les partis en lutte, etc. Il favorisera bien plutôt la vision romantique de l’Histoire, tournant autour de quelques grandes figures, « héros » de la tragédie : les Danton, Robespierre, Mirabeau, Cadoudal, etc.

C’est donc un jeu de roman, un jeu de film hollywoodien, un jeu de théâtre classique, selon comment on le joue exactement ; mais ce n’est pas un jeu d’histoire, un jeu de réalisme, un jeu de naturalisme. Le Bonnet & la Pique est structuré par les idéaux, les caractères innés, les fortes individualités, voire même, au final, par une conception idéaliste et très romanesque, ou littéraire, de l’Histoire. La pertinence de telles idées n’en est pas pour autant affirmée. C’est un parti-pris assumé, et à assumer par le MJ et les joueurs... Ceux-ci devront aussi s’adapter à un système qui n’est pas tout à fait celui des jeux de rôles « classiques » (quoiqu’il ne soit pas non plus totalement différent).

L’équilibre exact entre « réalisme » et « romantisme » reste à établir par le MJ. En effet, le choix du recours aux Caractères et la mesure dans laquelle il y est fait recours reste à son appréciation. Cependant, répétons-le, trop de réalisme supprimera un mécanisme fondamental du jeu. Le Bonnet & la Pique est un jeu conçu pour considérer, pour donner des exemples plus concrets, qu’un homme seul peut se battre comme cinq, comme dix, comme vingt peut-être si sa détermination à faire vaincre sa cause est absolue ; qu’une foule peut être retournée par un beau discours et par une voix de tonnerre ; voire même que la Providence peut favoriser les justes et les purs.

Cependant, les modulations sont indubitablement possibles. On peut aller du Walter Scott, où les personnages et leurs caractères sont bien présents mais restent victimes des vicissitudes d’une histoire qui les dépasse et à laquelle ils doivent s’adapter, à la conception si souvent vue dans les histoires nationalistes du XIXème siècle, et même encore dans celles d’aujourd’hui, que le « destin » d’une nation est façonné par quelques héros, quelques génies, quelques géants d’envergure mondiale. Cette modulation dépend aussi, entre autres, du niveau auquel le MJ souhaite faire jouer sa partie. Il peut vouloir mettre ses joueurs dans la peau d’hommes de parti dévoués certes, mais à l’influence limitée, obscurs mêmes, car placés tout au bas de l’échelle ; ou il peut vouloir aller jusqu’à faire jouer de grands chefs, dont le nom est connu de tous, dont chaque action compte énormément, qui ont des partis, des nations entières à leurs ordres... Elle dépendra aussi, pour donner un autre exemple, du contexte choisi ; il y aura plus de possibilités pour quelqu’un de provoquer des changements radicaux dans un contexte troublé, ou à l’occasion d’un scénario mettant des éléments très importants en jeu. Enfin, elle dépendra, et cela est essentiel, des libertés que le MJ est prêt à prendre avec l’Histoire telle qu’elle a eu lieu, du degré auquel il est prêt à la laisser réécrire par ses joueurs.

Tout cela étant dit, il serait également sage pour le MJ d’adapter tout cela à la motivation et à l’efficacité dont font preuve ses joueurs. Car, à nouveau, l’idée qui motive le système des Caractères est qu’un obscur partisan isolé dans un pays paisible peut, à force de détermination, d’éloquence, d’inspiration, de volonté supra-humaine, de chance providentielle et de talent personnel, amener le renversement d’un régime multiséculaire... Ce qui est totalement irréaliste, évidemment. Mais c’est un peu la magie, l’élément fantastique du Bonnet & la Pique. C’est plus original que les boules de feu, non ?

Caractères

Les Caractères sont notés de 0 à 10. Un Personnage doit répartir 40 points parmi les divers Caractères.

Charisme

Il est certaines personnes qui savent mettre dans leur discours un tel feu, dans leur personne un tel magnétisme, qu'à leur appel les masses se soulèvent, les oppositions se taisent, et que tous sont convaincus, plus par le sentiment que par la Raison, de suivre l'orateur. C'est là ce que l'on nomme le Charisme, et bien malheureux dans sa carrière sera le député ou le général qui en sera dépourvu. En ces temps d'effervescence où la parole pèse lourd, le triomphe attend ceux qui se feront l'organe du Peuple ! Mais prenez garde, Citoyen : il n'y a pas loin du Capitole à la roche Tarpéienne, et il n'est parfois pas bon d'être remarqué.

Détermination

La victoire ou la mort, tel est le voeu du Citoyen qui possède cet admirable caractère qu'est la Détermination. Refusant de ployer devant les difficultés, les rigueurs, les souffrances, les coups du sort, le nombre de ses ennemis, il ne se découragera pas, restera ferme et constant, maintiendra intacte sa volonté de triompher. Et certes, il en aura besoin parmi les mille périls qui guettent ceux qui sont engagés dans la Révolution ! Dangereuse détermination, cependant : car si le Chêne est plus superbe que le Roseau, chacun sait bien qu'il casse lorsque le vent est trop fort contre lui.

Elégance

Faire, certes, cela est bien ; mais bien faire, cela est mieux. L'Elégance, voilà le caractère de ceux qui procèdent avec finesse, mettent dans leurs actes et leurs paroles de la grâce, de la beauté, des traits plaisants et adroits, bref de l'art. Beaux esprits et beaux parleurs en font le mieux montre, et l'élégance d'esprit et d'apparence peut servir grandement bien des carrières – depuis l'artiste jusqu'au grand de la Nation. Mais hélas, les durs temps de la Révolution montrent parfois peu de pitié pour la délicate Elégance ; est-il encore possible de la suivre inconditionnellement lorsque la situation appelle à des actes brutaux ?

Fougue
« Tout s'émeut, tout s'ébranle, tout brûle de combattre, tout se lève en France d'un bout de l'empire à l'autre... Le tocsin qui sonne va se propager dans toute la France. Ce n'est point un signal d'alarme, c'est la charge contre les ennemis de la patrie. Pour les vaincre, Messieurs, il nous faut de l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace, et la France est sauvée ! »
- Danton à l'Assemblée, le 30 août 1792

La Fougue est la mesure de l'élan, de l'audace, de l'énergie et de l'abnégation avec lesquelles le Citoyen se jette dans la mêlée pour défendre ses idées, du courage flamboyant qu'il montre dans les moments les plus difficiles. On n'en trouve point de plus belle que celle des Fédérés montant aux frontières, des assaillants de la Bastille, des vainqueurs de Valmy. Parfois, un tel caractère amène à faire le sacrifice suprême et à mourir au combat – mais quelle plus belle mort pour les braves ?

Pureté

Honnêteté, vertu, fidélité, voilà ce qu'attend du Citoyen une société régénérée ; et c'est là toute la Pureté. Ceux qui en font preuve sont ceux qui savent agir sans reproche au plus fort de la tourmente révolutionnaire, ces purs esprits incorruptibles dont l'intégrité morale reste sans faille, dont l'idéalisme reste intact. Leur esprit est mieux trempé, et leur autorité plus grande, car leurs principes inébranlables les fortifient. Sans doute sont-ils aussi les mieux à même de supporter moralement les plus cruelles situations. Hélas ! Avoir de grands principes est aussi, parfois, un bien grand fardeau...

Subtilité

Voir toutes les facettes des choses, avoir des actes et des pensées complexes, toujours soupçonner, chercher, parfaire, voilà la Subtilité, caractère de nombreux esprits que l'on pourra dire géniaux ou retors, selon qu'ils appartiennent à un artiste, un diplomate, un comploteur. Ce caractère incite au discernement, à la finesse, à l'étude... mais aussi au soupçon, au doute, à la complexité.

Caractère supplémentaire

Si le personnage le désire, il peut choisir un caractère supplémentaire qui servira à mettre l'accent sur un trait particulièrement significatif du comportement de son personnage. Au joueur et au MJ de déterminer exactement ce caractère, ses avantages et ses inconvénients.

Talents & Compétences

Les Talents sont au nombre de quatre : Force, Agilité, Savoir, Raison. Ils mesurent les capacités générales du personnage, son potentiel brut dans un type d'activité. Ces Talents sont directement fonction des Compétences. En effet, chaque Compétence choisie par le personnage dépend d'une combinaison de deux Talents, ou de deux fois le même talent : cela est indiqué par les initiales A(gilité), F(orce), R(aison), S(avoir). Après avoir choisi toutes ses compétences, le personnage additionne le nombre de points dans chaque Talent que ses compétences lui donnent, en multipliant, à chaque fois, par son score dans la compétence en question. Par exemple, un personnage ayant 10 en Escrime obtient 10 points en Force et 10 en Agilité. Ces points sont ensuite divisés par 20 pour donner le score du personnage dans chaque Talent. Les Compétences, mesure des connaissances et savoirs-faire précis du personnage, sont notées de 0 à 20. Un Personnage dispose de 100 points à répartir dans les Compétences.

L'Artisan
  • Bâtiment (AF)
  • Cordonnerie (AS)
  • Coupe (AS)
  • Cuisine (2S)
  • Dressage (2S)
  • Forge (AS)
  • Menuiserie (AS)
  • Portefaix (2F)
  • Questions agraires (2S)
L'Artiste
  • Art plastique (AS)
  • Esthétique (RS)
  • Instrument de musique (AS)
  • Poétique (RS)
L'Orateur
  • Art oratoire (RS)
  • Diplomatie (RS)
  • Etiquette (2S)
  • Rhétorique (2R)
Le Praticien
  • Chirurgie (AS)
  • Droit (RS)
  • Finance (RS)
  • Génie (RS)
  • Langue étrangère (2S)
Le Savant
  • Géographie (2S)
  • Histoire (2S)
  • Mathématiques (RS)
  • Mécanique (RS)
  • Médecine (RS)
  • Philosophie (RS)
  • Physique-chimie (RS)
  • Théologie (RS)
Le Sicaire
  • Acrobatie (2A)
  • Baratin (RS)
  • Cambriolage (AS)
  • Connaissance de la ville (2S)
  • Déguisement (AS)
  • Discrétion (2A)
  • Escalade (AF)
  • Intimidation (FS)
  • Réseaux (2S)
Le Soldat
  • Artillerie (AS)
  • Défense (AF)
  • Escrime (AF)
  • Explosifs (AS)
  • Lancer (AF)
  • Lutte (AF)
  • Tactique (RS)
  • Tir (2A)
Le Voyageur
  • Equitation (2A)
  • Marche (2F)
  • Nage (AF)
  • Navigation (RS)
  • Survie (2S)
  • Timonerie (AS)


Mécanismes

Combat

Toutes autres choses étant égales, l'initiative est déterminée en additionnant Agilité + Score dans l'arme utilisée/4 + 1d6. Le combattant attaqué peut réagir à condition qu'il ne soit pas surpassé de plus de 10 en Initiative. L'attaquant garde l'initiative jusqu'à ce qu'il échoue dans une de ses attaques ou que le défenseur réussisse une défense avec une marge de différence de plus de 5 par rapport au jet de l'attaquant. En cas d'attaque réussie, les dommages infligés sont égaux à la marge de réussite de l'attaquant, plus le modificateur de dégâts de l'arme. Si le défenseur a réussi sa défense, mais avec une marge moindre, il est touché, mais la marge de réussite de la défense est soustraite à celle de l'attaque. Tout personnage dispose de (10 + score de Force) points de vie. Ceux-ci représentent les dégâts que peut supporter un personnage avant que sa vie soit vraiment en danger. Arrivé à zéro points de vie, il doit faire un test de Fougue ou de Détermination – à lui de choisir, à moins que les circonstances penchent vers la mise en jeu d'un de ces Caractères. Par exemple, une blessure à un moment critique d'un combat ferait plutôt appel à la Fougue, mais résister à une maladie ou à la douleur dans des circonstances plus calmes serait plutôt une question de Détermination. Le role-play du personnage est également déterminant. Ce test doit être répété à chaque déterioration de l'état de santé du personnage, son nombre de points de vie servant de malus. En cas d'échec, le personnage s'évanouit et peut éventuellement mourir des suites de ses blessures s'il n'est pas soigné.